vendredi 29 mai 2009

Climat : un débat biaisé et un scepticisme méprisant pour les sciences

Réchauffement climatique, un débat de société

En France, Claude Allègre est pressenti pour revenir au gouvernement. Célèbre géophysicien, auteur de nombreux articles scientifiques, il était aussi membre du parti socialiste français. Rien de bien particulier jusque là sauf... qu'il est aussi un très médiatique opposant à la théorie du réchauffement climatique d'origine humaine. Il n'est pas le seul ; il est, en quelque sorte, le fer de lance d'une vague assez remuante en France de "sceptiques", où l'on trouve par exemple le philosophe Luc Ferry. Et les médias, friands de polémiques et de débats (c'est leur job) en font l'écho. Le monde politique aussi, à l'instar de l'UDC en Suisse, qui fonde son "argumentaire environnemental" sur ce scepticisme. Et au milieu, le public, pas toujours au fait de toutes les circonvolutions du raisonnement scientifique, commence à ne plus savoir "qui croire". Dans une période où l'urgence environnementale ne laisse plus place aux tergiversations, il est bon d'amener un peu d'ordre dans ce débat - climat et rôle de l'espèce humaine dans le dérèglement de la biosphère -, débat que je qualifie de biaisé. Voyons pourquoi!

Comprendre le débat est essentiel

Regardons, dans un premier temps, ce qui se passe du côté de la science. La Science n'est, en fin de compte, qu'un ensemble de chercheurs, qui argumentent autour de théories diverses. C'est donc une "communauté" de discussions et de débats : des théories sont attaquées ou défendues, mais le but n'est pas d'obtenir une quelconque "vérité", cette dernière notion étant plus du domaine de la "croyance".

Le débat en science est donc naturel ; il s'agit même du moteur de la recherche. Or, lorsque l'on transpose un débat scientifique dans un contexte public, le cadre change évidemment. Le grand public comprend ce genre de débat de manière plus tranchée, un peu comme cela : la théorie de base est contestée, alors c'est qu'elle est fausse ; l'argumentation de défense de la théorie de base, démontant la contestation, n'est rien d'autre qu'une tentative de sensure, etc. Or, ce n'est pas le cas. Souvent, il s'agit d'une remise en cause d'une méthode de travail, de marges d'erreur ou de postulats de départ trop optimistes ou trop pessimistes. Il n'y a pas forcément une remise en cause du problème global. Par exemple, la théorie du Big-Bang sur la naissance de l'Univers a été, et est toujours, sujète à nombres d'attaques rationnelles, obligeant les scientifiques à parfaire leurs travaux. Mais cet état de fait, et les diverses modifications à la théorie générale de l'évolution de l'univers qu'il a suscité, n'ont pourtant pas donné un quelconque crédit supplémentaire à la vision d'un univers éternel et immuable que l'astrophysicien Fred Hoyle, opposant de la première heure à la théorie du Big-Bang, a défendu durant toute sa vie. Autre exemple caractéristique : celui de l'évolution de la vie. Des scientifiques, comme Charles Darwin, ont brisé le dogme religieux en vigueur à l'époque et émis l'hypothèse que toutes les formes de vie ont évolué, lentement et de manière continue, à partir d'une forme primitive et fondamentale. Depuis lors, de nombreux mystères restent encore à percer. Cependant, une grosse remise en question de l'évolution "darwiniste" s'est produite au 20ème siècle. Alors que l'on pensait que l'évolution se faisait de manière lente, avec une progression de la biodiversité, des découvertes géologiques ont montré plus ou moins l'inverse. L'évolution globale a connu des bonds prodigieux et rapides, suivis de périodes plus lentes ; des extinctions de masse se sont produites, dans des temps géologiques très courts ; la biodiversité n'était pas spécialement plus faible que maintenant, bien au contraire, car à certaines époques, on dénombrait, par exemple, plus de types différents d'invertébrés qu'actuellement (voir la faune cambrienne d'Ediacara et celle des Schistes de Burgess). Mais, pour autant, ces modifications très importantes de la vision purement darwinienne de l'évolution n'ont pas entraîné la résurgence du créationnisme!

Ces quelques exemples montrent que, pour bien comprendre le débat qui subsiste au sein des climatologues, il faut aussi prendre en compte le contexte scientifique du dit débat. Evidemment, surtout quand on connaît un peu l'histoire des sciences, il faut garder à l'esprit que les scientifiques sont aussi des êtres humains, qui peuvent être pris au piège par un dogme.

Le doute, une chose très seine en science mais qu'il faut mener jusqu'au bout

En effet, certains sceptiques parlent de dogme en ce qui concerne le réchauffement climatique d'origine humaine. Sachant que les scientifiques ne sont pas à l'abri du dogmatisme, c'est peut-être leur meilleur argument. Sauf qu'ici, il devient difficile de considérer une telle éventualité dans le cas de l'écologie, tant la pluralité des spécialités engagées est élevée (des dogmes scientifiques ont, par le passé, touché une spécialité ou une autre, mais jamais un ensemble aussi vaste de domaines qui compose la prise de conscience écologique).

C'est évident, le doute et la remise en question sont des choses très importantes, surtout en science. Le problème, c'est que le doute des "sceptiques" ne va pas assez loin et, de ce fait, ressemble plus à une façade masquant un profond souhait d'immobilisme, une "pseudo remise en cause" pour essayer de faire oublier notre civilisation consumériste et les conséquences qu'elle entraîne.

En effet, les "sceptiques" force le débat général à ce rétressir au seul problème climatique. C'est oublier que l'espèce humaine menace la biosphère de plus d'une manière, entre guerres, pollutions, pillage des ressources et réduction de biodiversité. Le trou dans la couche d'ozone, lui aussi contesté par une armada de sceptiques, était finalement bien réel. Il a prouvé que les activités humaines pouvaient favoriser des déséquibres physiques et menacer la vie sur Terre. Il a aussi démontré que des mesures correctrices mettaient un certain temps pour prendre effet (l'alerte a été donné en 1985 ; en 2006, la superficie du trou au-dessus de l'Antarctique a atteint son record...).

Mais, résonons par l'absurde. Admettons que, contrairement au trou d'ozone, le réchauffement climatique d'origine humaine ne soit qu'un dogme scientifique. Mais l'érosion de la biodiversité est bien réel. Il n'est pas seulement imputtable au réchauffement climatique. En effet, le climat de la Terre n'a jamais été stable ; notre planète a été complétement prise par les glaces, il y a 2,2 milliards d'années et il y a 800 millions d'années, alors qu'elle était très aride au Trias, entre 250 et 200 millions d'années avant notre ère. Certaines de ces fluctuations ont conduit à des extinctions, mais les écosystèmes se sont modifiés en conséquence, car, hormis des obstacles géographiques, rien d'autre ne s'opposait aux "migrations" biologiques. La Vie a ainsi survécu. Aujourd'hui, l'urbanisation sans compensation, les pillages des ressources naturelles, le braconnage, les pollutions et la réduction des divers habitats naturels font que cette réorganisation écologique (migrations d'espèces), en réponse au réchauffement, est plus difficile, voire même impossible. Ces fléaux fragilisent les écosystèmes existants (y compris l'espèce humaine), sabordant les chaînons d'un ensemble de systèmes - la biosphère - qui s'est pourtant maintenu depuis plus de 3,5 milliards d'années. Ainsi, le taux d'extinction actuel est 100 à 1000 fois supérieur au taux moyen depuis l'apparition de la vie sur notre planète, et sa rapidité serait de 10 à 100 fois plus forte que pour les cinq grandes extinctions de masse que la Terre ait connu depuis sa formation (J.H. Lawton et R.M. May, Extinction rates, Oxford University Press, Oxford).

Alors oui, le doute est une bonne chose, messieurs les sceptiques. Mais pour qu'ils ne soient pas perverti, ce doute et cette remise en question doivent aller plus loin, et englober le problème dans son ensemble, à savoir l'impact de l'espèce humaine sur son environnement. Le climat n'est, au fond, qu'une partie du problème (certes importante). Mais, comme la climatologie n'est qu'une science parmi tant d'autres, la biosphère intègre aussi d'autres paramètres que celui du climat, comme par exemple la biodiversité. Et les activités produisant de forts dégagements de CO2 sont souvent très dommageables pour la biodiversité. Sans parler des impacts humains (troubles géopolitiques, etc.). On le voit donc : les sceptiques simplifient (à dessein sans doute) le débat et, par leur négligence de l'importance du problème, montrent également leur véritable but : maintenir la désinformation pour maintenir l'immobilisme (ou leurs acquis).

Une remise en question de l'impact humain sur l'environnement, portée par des gens non qualifiés

Car, que penser d'un "scientifique" comme M. Allègre, lorsque celui-ci, à ce titre, intitule un livre "Ma vérité sur la planète"? Un scientifique qui parle de vérité et de mensonge... C'est un comble! Que penser d'un Luc Ferry, se permettant de critiquer des théories dont il n'a de toute évidence pas les compétences pour juger, tout cela sur fond de négationisme écologique? En effet, notre cher philisophe doit encore penser que la science ne se résume qu'à l'économie ; signe de son ignorance, il semble ne pas savoir que l'écologie est une science à part entière. Que penser de la presse de boulevard, où les journalistes, peu entraînés à l'argumentation scientifique sans doute, reprennent ce scepticisme dogmatique, simplement pour faire du "chiffre", sans prendre le temps de renseigner le public sur les caractéristiques propres au débat scientifique?

Que penser de tout cela? Et bien, sur le fond, il ne s'agit que d'une manifestation de ce que j'appelle, certes de manière provocatrice, le dogme créationniste : la vision d'une "Nature et d'une Terre faites pour la seule convenance de l'Homme, dont leur capacité à absorber tous ses excès est infinie". Il n'est nullement besoin d'être physicien pour comprendre qu'une telle vision est éronnée. Et pourtant, certains sceptiques se qualifient de rationnels... tout en remettant sans cesse en cause cette capacité de notre espèce à épuiser la biosphère, et donc à nuire sur son environnement. Elle est pourtant là, et les exemples sont multiples : espèces envahissantes introduites par négligence ou ignorance, déforestation abusive, crise climatique, pollution et non respect des lois, etc.

D'autre part, les sceptiques provenant du monde de la science sont , parfois, de "mauvais scientifiques", pour la simple et bonne raison qu'ils ne tiennent souvent compte que de leur "spécialité". Sous prétexte qu'ils sont opposés à la théorie du réchauffement climatique d'origine humaine, ils font du tapage médiatique en critiquant les mesures de réduction d'émission de CO2, tout en ignorant les conclusions d'autres spécialités, comme les écologues, les biologistes ou encore les ethnologues, qui pointent du doigt les conséquences écologiques, géopolitiques et humanitaires qu'impliquent les filiaires conduisant à ces émissions (filiaires de l'extraction du pétrole, par exemple). Cette étroitesse d'esprit est profondément irrationnelle, et n'a vraiment pas lieu d'être chez des scientifiques se disant pourtant libres et n'étant pas sous "pressions économiques".

Il n'est plus temps de perdre du temps

Le débat scientifique doit donc se poursuivre, sans entrave. Il est un aspect normal de la science, et les médias doivent intégrer cette donnée avant d'émettre des spéculations sans fondement, uniquement parce que les polémiques font vendre. Une retranscription honnête de ce qui caractérise la climatologie comme les autres sciences permettrait au débat public d'être plus clair et empêcherait un rattrapage populiste. Par exemple, les sceptiques prétendent, en climatologie, subir des "pressions" pour les crédits de recherches. C'est oublié que cela touche toute la science, surtout celle fondamentale, celle que je qualifie "sans retour sur investissements économiques rapides". Que doivent dire les scientifiques de terrains, zoologues, écologues, ethnologues et autres, qui, sans doute parce qu'indirectement ils remettent (réellement) en cause certaines idées reçues de notre civilisation occidentale, ne touchent presque rien!

Il faut donc que le grand public puisse comprendre qu'un débat scientifique sur une question scientifique est parfaitement normal et n'implique pas forcément une remise en question totale du problème de départ : l'impact négatif de l'Homme sur l'environnement. Cette compréhension lui permettrait de ne pas tomber dans le piège tendu par certains "sceptiques" : au-delà de toutes réserves que l'on peut avoir vis-à-vis des travaux du GIEC, il est clair que la lutte contre les émissions de CO2 est positive à plus d'un titre, directement ou indirectement. Le changement de politique énergétique mondiale, censé remplacer les ressources fossiles par des ressources renouvelables, est un espoir concret pour les pays du Tiers-Monde et, en outre, un formidable tremplin technologique, dont la Science en sortira grandie (nouvelles connaissances en efficacité énergétique, en urbanisme, en science des matériaux, en sciences naturelles, etc.). La lutte contre les émissions de CO2 a donc plus d'un avantage, n'en déplaise aux sceptiques.

Car le temps presse. L'exode climatique de populations entières est déjà en marche. Les ressources naturelles se raréfient. Les forêts primaires, poumons de la planète et réserve incroyable pour la recherche médicale, se rétrécissent à vue d'œil. La Science, indirectement, tire la sonnette d'alarme et secoue les consciences, car sa vocation, n'en déplaise aux sceptiques, n'est pas de conforter notre civilisation et son idéologie dominante. On a déjà perdu beaucoup de temps. Renvoyons les sceptiques à la définition de la Science : "Ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits, d'objets ou de phénomènes obéissant à des lois et vérifiées par des méthodes expérimentales" (Le Petit Larousse Illustré, 2004) ; on parle bien d'ensemble de connaissances (pas seulement celle de l'économie par exemple) et de théories régies par des lois et vérifiées expérimentalement (les sciences naturelles entrent bien dans cette définition). Il serait bon, donc, que les sceptiques soient aussi sensibles aux conclusions des écologues, des biologistes, des anthropologues, des ethnologues, etc. Là, il pourront vraiement juger si réduire les émissions de CO2 est ridicule ou non.

Sandro

mercredi 27 mai 2009

La vérité sort toujours de la bouche des enfants

La vidéo ci-dessous vaut tous les commentaires. Malgré la mauvaise qualité de l'image, le message, datant de 1992, est encore d'une cruelle actualité. Écoutez (plus que voir) cette jeune fille, Severn Cullis-Suzuki, s'exprimant avec une telle aisance, devant une assemblée des Nations Unies! Le plus triste, pour cette fille comme pour des millions d'autres enfants dans le monde, c'est que, près de 17 ans plus tard, rien n'a changé...



A méditer!

Sandro

mercredi 20 mai 2009

Valais : les Jeunes UDC devraient réviser leurs cours de sciences

Si elle n'en demeure pas moins un outil indispensable à toute démocratie, la politique a, parfois (malheureusement), la faculté d'agacer, tant les luttes de personnes prennent le pas sur des problèmes concrets. Elle peut aussi "amuser" (de manière sarcastique), tant les messages qui y sont véhiculés manquent de bases rationnelles et trahissent, outre un profond irrespect de la population et une intolérance scandaleuse, de vastes "lacunes de connaissances". Remarquez, l'intolérance est souvent le signe de l'ignorance...

Et dans ce registre, en Suisse, les Jeunes UDC du Valais brillent tout particulièrement. Le 17 mai dernier marquait la journée internationale contre l'homophobie. A cette occasion, on pouvait lire, sur le site du parti national xénophobe, la prise de position suivante :

homo17maiA l’occasion de la Journée mondiale du 17 mai en faveur de l’homosexualité, les Jeunes UDC du Valais romand rappellent leur attachement au droit naturel et chrétien et condamnent fermement la banalisation de ce comportement déviant.

En effet, la nature de l’homme est régie par des lois qu’une conscience droite découvre sans difficulté. Une d’elles montre que la différence des sexes a pour but principal la procréation. C’est notamment par le respect de cet ordre que les êtres humains trouvent leur épanouissement.

Il est dès lors regrettable et scandaleux que des institutions publiques, tout comme malheureusement la majorité de la classe politique et l’Etat, se mettent à promouvoir un choix de vie qui s’inscrit contre la famille, lieu de perpétuation de la génération humaine et donc de la survie d’une nation.

En conséquence, les Jeunes UDC du Valais romand condamnent fermement la reconnaissance de cette … vicieuse Journée mondiale. Cette dernière ne vise en effet qu’un seul but : la banalisation d’un comportement qui s’inscrit contre la famille et également contre l’équilibre psychique et moral de la jeunesse.

Jeunes UDC du Valais romand
Grégory Logean, Président et Conseiller municipal
Noélie Bron, Secrétaire

Je vous laisse "savourer" toute la "profondeur" du "raisonnement" que nos chères têtes blondes rasées nous ont concocté. Mais, bien qu'un recul soit difficile à prendre devant de pareilles bêtises, il est intéressant de sortir du contexte politique et d'analyser certains détails du texte ci-dessus.

L'illustration utilisée est bien connue ; il s'agit d'une reprise de l'image ci-dessous, où l'on voit un singe se redressant pour aboutir à l'Homme.


Mais cette "vision" de l'évolution humaine a, depuis un certain temps déjà, été reconnue fausse. En effet, elle laisse supposer que cette évolution s'est faite de manière continue, allant vers une croissance de la diversité et de la complexité. Or, l'évolution humaine, à l'instar de l'évolution de l'ensemble du vivant, ne s'est pas faite de cette manière ; un grand nombre d'espèces "humaines" a existé, une seule a survecu : la nôtre. En effet, si Homo sapiens descend bien de singes primitifs (nous ne sommes, par définition, qu'une espèce de grands singes sans poil), l'Homme de Néandertal (Homo neanderthalensis), par exemple, n'est pas notre ancêtre mais un cousin qui a vécu en même temps que les premiers Homo sapiens. Dans le même ordre d'idée, le chimpanzé, contrairement à ce qui est représenté dans l'image ci-dessus, n'est pas notre lointain ancêtre, mais un descendant de ses grands singes préhistoriques, dont notre lien de parenté remonterait à quelques 6 millions d'années (Richard Dawkins - Il était une fois nos ancêtres). Mais il est clair que cette conception artificielle d'une "évolution" vers plus de "complexité", illustrée par l'image ci-dessus, matinée par quelques considérations d'ordre religieuses ou raciales (Charles White, Regular Gradation in Man, 1799), a été employée très souvent par certaines idéologies xénophobes, notamment politiques mais, c'est le cas de le dire, bien éloignées de toutes considérations intellectuelles, scientifiques ou rationnelles.

Rien d'étonnant donc, à ce que l'UDC, dans son manque flagrant de ressources solides, pioche ainsi dans des concepts faux et dépassés. Des concepts, véritables dogmes, reconnus comme erronés depuis plusieurs décenies déjà! Les Jeunes UDC devraient retourner à leurs études et à leurs livres (qui ne servent pas de bois de chauffage, ABE) : comment pourrait-on considérer leurs positions politiques, si leur base argumentative ne se résume qu'à un tissu de bêtises dogmatiques, illustrée par des données fausses? Du reste, je me suis cantonné uniquement sur l'image utilisée dans le texte des Jeunes UDC. Mais l'analyse pourrait, sans effort, se reporter à bon nombre de points avancés. Notamment, les études en anthropologie, primatologie et psychologie nous apprennent que les relations amoureuses et sexuelles chez les hominidés ne se basent pas uniquement sur des préoccupations fondamentales telles que la reproduction ; les facteurs, tels les liens sociaux, l'équilibre mental et le simple plaisir, interviennent également de manière remarquable, comme chez les singes bonobo et les êtres humains. L'homosexualité n'est donc pas un comportement dévient, puisqu'elle participe à maintenir un équilibre de vie nécessaire à l'épanouissement de cette population. La déviance serait plutôt à chercher du côté de la désinformation haineuse véhiculée par des groupes de la "trempe" des Jeunes UDC...

On le voit donc, le populisme, quand on prend la peine de l'étudier un peu, ne se résume finalement qu'à un chaos d'idées, maelstrom de propos et d'attaques irrationnels sans fondement, réceptacle d'une haine et d'une incompréhension de choses, de phénomènes, de gens que l'on ne connaît pas. Il est piquant de constater que de telles remarques proviennent d'un parti "donneur de leçons". Mais comment peut-on en donner, lorsqu'on est aussi peu "informé" que ces Jeunes UDC? Une chose à retenir : l'UDC ne rime finalement qu'avec xénophobie et intolérance, conséquences et manifestations de la simple ignorance. A la vue de la propagande populiste homophobe, je dois toutefois concéder qu'il existe bien, chez ces gens-là, une tendance naturelle vers la régression, telle qu'illustrée. Vers une amibe UDC?

Donc, curieuses et curieux du net, lisez, instruisez-vous, informez-vous! Imprégnez-vous de sciences, de culture, d'information ou d'art. C'est la seule solution pour que ces mouvements et partis xénophobes, dogmatiques et passéistes, basés sur l'ignorance (UDC en Suisse, MCG à Genève, Front National en France, Il Popolo della Libertà en Italie, etc.) puissent enfin obtenir le seul statut qui leur sied à merveille : celui d'espèce éteinte!

Sandro

lundi 11 mai 2009

Biodiversité 1 - La vie endémique des Canaries

J'ai eu la chance, il y a plus d'une année, de passer une semaine de vacances sur la Grande Canarie, grande île de l'archipel des Iles Canaries, au large du Maroc. Une période trop courte, surtout si l'on désire explorer les moindres recoins de l'île... et un moment de frustration, pour le passionné des volcans que je suis, de ne pas avoir l'occasion de réaliser son rêve d'enfant : gravir un volcan actif. Qu'à cela ne tienne! En plus d'une semaine de détente avec ma petite famille, j'ai eu l'occasion d'assouvir ma curiosité naturaliste à plusieurs reprises. Il faut dire que les îles de l'archipel, malgré un tourisme quelque peu "envahissant", reste un bon exemple pour mieux comprendre l'écologie et ses enjeux.

On se console comme on peut : par le hublot de l'avion, je suis tout excité à la vue de la morphologie de l'île. La Grande Canarie n'est rien d'autre qu'un vieux volcan, éteint depuis des millions d'années. Les volcanologues appellent ce type d'édifice un volcan-bouclier, montagne aux pentes douces, signe d'une activité essentiellement effusive (comme Hawaï). Aujourd'hui, ce volcan endormi culmine à près de 2000 mètres d'altitude ; il a été profondément attaqué par l'érosion mais il subsiste encore quelques traces assez fraiches de son passé tumultueux (divers cônes adventifs, dont la caldeira de Bandema, cratère de 200 mètres de profondeur et de 1 kilomètre de diamètre). Mais au-delà de l'aspect géologique, cette physionomie particulière offre, encore aujourd'hui (mais pour combien de temps) un refuge à une biodiversité particulière, où certaines espèces ne se trouvent que dans l'archipel (et nul part ailleurs dans le monde).

Ile de Grande Canarie. Les pentes douces de la montagne trahissent ses origines, une accumulation de lave très fluide qui, au fil des temps, a édifié ce volcan. L'érosion, assez active sous ce climat subtropical, a sapé l'édifice, en creusant de profondes vallées (visibles au centre) appelées barrancos.

Contrastes étonnants : l'autoroute terne et noire, reliant l'aéroport à Maspalomas, dans le sud de l'île, longe des coulées de lave rougeâtres que la végétation égaie d'une multitude de couleurs, vertes, mauves et jaunes. Premier contact avec la flore du pays, j'observe les Euphorbes des Canaries (Euphorbia canariensis). Ces plantes, qui ressemblent à des cactus (mais qui n'en sont pas), sont endémiques de l'archipel, à l'instar du dattier des Canaries (Phoenix canariensis), c'est-à-dire qu'on ne trouve ces espèces, à l'état naturel, qu'aux Canaries. Du reste, la Grande Canarie dénombre près de 600 espèces de plantes, dont 101 sont endémiques à l'archipel (parmi elle, le pin canarien Pinus canariensis) et 95 à l'île elle-même. Cette richesse végétale, à laquelle je ne suis, en bon Européen, pas habitué, dissipe quelque peu mes "frustrations" de volcanologue amateur...

Vipérine arbustive (Echium decaisnei), espèce de vipérine originaire des iles Canaries.

Du côté du règne animal, là non plus, on ne reste pas longtemps sur sa faim sur l'île de la Grande Canarie. Une simple promenade à Maspalomas et l'œil du touriste européen est vite attiré par le vol rapide d'oiseaux aux belles couleurs vertes inhabituelles. Ce sont des perruches à collier (Psittacula krameri), espèce à l'aire de répartition très vaste (Afrique subsaharienne).

Perruche à collier (Psittacula krameri).

Dans les marais bordant les célèbres dunes de Maspalomas, une faune à la fois familière et à la fois très spéciale attend le visiteur curieux. En effet, j'y retrouve la foulque et le héron cendré (Ardea cinerea), majestueux échassier discret que l'on croise également dans la région genevoise.

Héron cendré (Ardea cinerea).

Couple de goélands leucophée (Larus michahellis). Espèce quasiment disparue au début du 20ème siècle, sa population a véritablement explosé depuis, profitant des activités humaines (rejets des pêcheries intensives, déchets urbains, etc.). Du reste, certaines espèces de goélands sont considérées comme envahissantes, tant leur nombre est important et tant la pression qu'elles exercent sur d'autres espèces animales, parfois de grande taille, commence à poser problème ; en Patagonie, le goéland Larus dominicanus s'en prend aux baleines franches australes (Eubalaena australis), les blaissant pour manger leur peau et leur graisse. Ce comportement, apparu récemment, est attribué aux effets des activités humaines et illustre bien les déséquilibres que l'Homme, volontairement ou non, entraîne sur son environnement.

L'île compte quelques 48 espèces d'oiseaux nicheurs. Je n'ai malheureusement pas eu la chance d'observer le pinson bleu de Grande Canarie (Fringilla teydea sp polatzeki), espèce typique de l'île. Cette espèce se trouve sur la liste rouge de l'UICN. Il s'agit d'un cas classique concernant une espèce endémique : les populations de pinson bleu étant peu élevées, ayant décrues ses dix dernières années, ainsi que leur aire de répartition très limitée (une sous-espèce à la Grande Canarie, une autre à Tenerife), l'UICN les a classé comme espèces quasi menacées.

Mais, en terme de vertébrés endémiques, ce qui surprend le plus, ce sont les espèces de reptiles qui vivent sur l'archipel canarien. Aucun serpent (sauf erreur), mais plusieurs espèces de lézards... et quels lézards! Les îles Canaries comptent en effet les plus grands lézards d'Espagne et d'Europe ; alors que le lézard vert (Lacerta viridis), que l'on peut voir dans le Canton de Genève, fait à peine 30 centimètres de long, la petite île de la Gomera possède un lézard géant, le très rare Gallotia gomerana, identifié seulement en 1999, dont la taille dépasse le demi-mètre. La Grande Canarie n'est pas en reste en matière de lézard géant : le lézard géant de Grande Canarie (Gallotia stehlini), espèce omnivore endémique à l'île, peut atteindre près de 80 centimètres du bout du nez à l'extrémité de la queue.

Lézard géant de Grande Canarie (Gallotia stehlini), photographié "par hasard" alors que j'étudiais une strate de lave dans le nord de l'île. Noter la queue "dédoublée" ; suite probablement à un combat avec un congénère ou une attaque d'un prédateur, celui-ci a perdu un bout de queue, qui a repoussé à double.

Ce bref inventaire de la biodiversité de l'île de la Grande Canarie n'est, bien sûr, pas exhaustif, ce d'autant plus que, ne faisant pas de plongée sous-marine (à mon très grand regret...), l'autre aspect de sa biodiversité - la vie marine - m'est complètement inconnu. Un bref saut sur Internet permet toutefois de vite s'apercevoir que la vie marine y est très riche. Avis à tous les plongeurs!!!

Les îles Canaries, et celle de la Grande Canarie, sont des exemples typiques de biodiversité élevée, liée à un contexte donné (insularité, climat subtropical, etc.), avec un taux relativement élevé d'endémisme (plus de 15% des espèces végétales endémiques à la Grande Canarie). Le plus remarquable, c'est que cette biodiversité se retrouve sur des surfaces très petites (1'560 km2 pour la Grande Canarie). Cet endémisme coïncide souvent avec des populations relativement peu élevée en nombre ; avec l'extrême adaptation au milieu, le nombre d'individus d'une espèce endémique est un des facteurs clé pour comprendre à quel point celle-ci peut être sensible aux perturbations de l'Homme. Dans un contexte fortement touristique et dégradé (la ville de Las Palmas étouffe dans un trafic qui n'a rien à envier à celui de Genève), j'espère donc que la biodiversité de Grande Canarie, avec ses lézards et ses reliques de forêts primitives, ne s'en trouvera pas plus menacée qu'elle ne l'est déjà. Espérons que son inscription comme réserve de biosphère par l'UNESCO protégera ce trésor unique de manière durable!

Sandro

Série "biodiversité", chapitre précédent : Biodiversité, une grande énigme, une source inépuisable d'émerveillement.


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Photos : Sandro Loi

Sources :
UNESCO, The MAB Biosphere Reserves Directory.
IUCN.
Tourisme et nature, Espagne.

vendredi 1 mai 2009

Mines antipersonnelles : cessons l'hypocrisie, les enfants en payent encore le prix.

Récemment, le gouvernement suisse s'est opposé à toute révision de sa politique en matière d'exportation d'armement. De plus, la Suisse qui, après quelques hésitations, a ratifié le texte définitif de la Convention internationale contre les armes à sous-munitions à Dublin, s'est vue recevoir l'opposition de l'UDC à la destruction des quelques 200'000 armes à sous-munition que dispose la pays. Cette hypocrisie politique a de quoi énerver, surtout quand on connaît les effets collatéraux de ce type d'arme.

Handicap International a lancé récemment une campagne afin de dénoncer ces problèmes. Trop d'innocents, les enfants en tête, souffrent dans leur chaire des conséquences de conflits parfois terminés depuis longtemps. Jouer au ballon dans un pré peut se révéler mortel dans certaines régions ; une partie de cache-cache peut se terminer par une détonation... Il est triste que, à l'instar de la nourriture, de l'accès à l'eau potable ou à l'éducation, des millions d'enfants dans le monde soient aussi "privés de jeu" à cause de la bêtise humaine.



Le travail de déminage qu'il reste à faire dans le monde est déjà énorme. Il me semble dès lors scandaleux, pour des raisons purement économiques, de maintenir un tel business, celui des armes, ceci sur fond d'hypocrisie politique. Allons plus loin que cela, et n'oublions jamais le drame peu médiatisé qui se déroule chaque jour à travers le monde. N'oublions jamais ces gens, ces enfants, mutilés pour toujours!

Merci pour eux.

Sandro