Biodiversité humaine, une notion à ne plus ignorer
Depuis plus d'une trentaine d'années, le monde de la science, emmené par les écologues, a intégré la notion que l'espèce humaine - et ainsi l'ensemble des différentes cultures, ethnies et populations qui la compose - fait partie intégrante de la biodiversité de notre planète. Homo sapiens, s'il peut parfois (souvent) être destructeur, vis-à-vis de ses semblables comme vis-à-vis des autres formes de vie peuplant la Terre, n'en demeure pas moins, strictement, une espèce de grands singes sans poil. Ainsi, la distinction, faite par une frange (trop) influente du monde politique, entre les questions "environnementales" et "sociales" n'est dès lors plus qu'un concept stérile et désuet. La variété des cultures et des modes de vie est l'une des manifestations de ce que l'on appelle la biodiversité, manifestations étudiées, entre autres, au sein de la discipline qu'est l'écologie humaine.
Et cette notion amène une quantité incroyable de surprises. En effet, les recherches ethnologiques ont montré qu'à l'époque de la conquête spatiale et d'Internet, des gens, en aucun point différents de nous, vivent encore avec des moyens et des techniques du fond des âges. Et jusqu'à récemment, ils vivaient heureux, libres, souvent en symbiose avec la Nature. Car ces gens, peuples premiers trop vite taxés de primitifs par des colons aux mœurs souvent bien plus barbares et rétrogrades, sont, à bien des égares, en avance sur nous, car ils connaissent depuis très longtemps la nécessité de préserver leur environnement, et ignorent notamment la notion de gaspillage. Des populations à la richesse culturelle inversement proportionnelle à la quantité de leurs possessions matérielles...
Et pourtant, de part l'ignorance de nos civilisations envahissantes, ces cultures, rescapées de milliers d'années de lutte pour la survie, sont en passe de disparaître, soit par la dissolution de leur identité, soit par la mort, ni plus ni moins, des populations, que ce soit du fait de pollutions, de conflits ou encore de famines. Certes, dans certaines régions, des études comme celle de l'Université Libre de Bruxelles, semblent montrer qu'il n'est pas encore trop tard pour inverser cette tendance. Mais pour cela, il faut de toute façon que le monde prenne conscience que le mode de vie "à l'occidental" représente également une menace pour la biodiversité humaine.
Réchauffement climatique
Le réchauffement climatique est la chose à laquelle on pense en premier. Les manuels de géographie nous ont parlé du phénomène de désertification frappant le Sahel - le lac Tchad en est une illustration saisissante - et contribuant à alimenter le flot sans cesse grandissant de réfugiers. Certaines populations du Pacifique voient leurs terres se saliniser, voire être submergées par les eaux. Le cas des Maldives, en quête de nouvelles surfaces colonisables, est bien connu. Mais qu'en est-il des peuplades peu connues du grand public? La lointaine Nouvelle Guinée nous rappelle que le problème climatique frappant la biodiversité humaine est encore plus vaste que ce que les médias, traditionnellement, relatent. Cela fait des décennies que les ONG tentent d'informer (souvent dans le vide) l'opinion publique sur le drame qui se déroule silencieusement dans l'Irian Jaya, région aux centaines de langues (271 langues en Nouvelle Guinée Occidentale). En 1997, le CICR parlait des conséquences que les fortes sécheresses ont eu sur les populations locales. L'impact du réchauffement climatique n'est pas une "musique d'avenir", mais bien une réalité que les populations les plus vulnérables connaissent déjà depuis de nombreuses années. Mais le climat n'est, et de loin, pas la seule menace qui pèse sur elles.
Les conséquences de la mondialisation
La mondialisation, au sens large, est un phénomène historique de "normalisation" dont l'origine remonte, selon certains, aux vagues de colonialisme qui se succédèrent depuis la "découverte" des Amériques par Christophe Colomb. Certes, tout n'est peut-être pas noir dans la mondialisation de nos jours. Mais, sans entrer dans les détails, certaines conséquences sont très perverses et contribuent, bon-gré-mal-gré, à un appauvrissement de la biodiversité humaine. L'une des conséquences de cette "imposition d'un mode de vie occidental" que représente la mondialisation est la sédentarisation. De nombreuses populations nomades ont perdu leur identité culturelle en se sédentarisant ; ainsi, des modes de vie séculaires parfois très respectueux de l'environnement (en ne restant pas de manière fixe en un seul lieu, ces modes de vie nomade permettaient aux champs et aux pâturages de se régénérer), ont disparu ou sont menacés de l'être, favorisant par là, dans certaines régions, l'appauvrissement des ressources locales (désertification). Et que dire du simple "choc des cultures"... Les Touaregs, ces fabuleux voyageurs du désert, sont ainsi purement et simplement menacés de disparition, car leur culture est indissociable du nomadisme.
Le "néo-colonialisme criminel" à l'origine de la déforestation des forêts primaires
Une autre menace, très sournoise elle aussi, n'est rien moins que notre consommation au sens large. Par exemple, les forêts représentent un refuge considérable en forme de vie, notamment humaines. Mais en même temps, elles suscitent la convoitise de nombreuses "entités", gouvernements ou multinationales. Certains assimilent cette convoitise à un "néo-colonialisme criminel", tant celle-ci a des conséquences dramatiques. Nous y reviendrons.
Les bois précieux, que l'on trouve dans les régions tropicales, comme le tek, sont très prisés chez nous, mais leur surexploitation, et les problèmes colatéraux liés à la déforestation, enlèvent du même coup des ressources vitales pour les populations locales (matériaux de construction, nourriture, médicaments, etc.). A ce besoin très "tendance" de bois précieux s'ajoute également celui, bien plus grand, du papier. Mais la déforestation a aussi d'autres origines, comme l'exploitation minière, les agro-carburants et l'agro-industrie en général, notamment la demande très importante en produits d'alimentation pour la production de viande dans les pays riches. Et ces exploitations sont rarement à l'avantage des populations locales. Voici une vidéo en deux parties sur un cas au Brésil.
Du reste, dans le domaine du non respect des gens, l'industrie agro-alimentaire est passée maître. Avec l'huile de palme, non contente de nous faire manger des graisses diététiquement de mauvaise qualité, cette industrie, sous contrôle de grands groupes européens, américains ou asiatiques, est à l'origine d'un vrai désastre écologique et humain. Voici, également en vidéo, sur deux partie, un témoignage poignant sur ce drame humain dont notre société de consommation basée sur la minimisation des coûts est la principale responsable. Ce témoignage nous vient d'une tribu de l'île de Sumatra.
De là vient le terme de "néo-colonialisme criminel"...
Un cri de désespoir qu'il nous faut écouter
Ce désespoir, exprimé par ces peuples souvent oubliés, doit enfin être entendu. Par ce billet, je tenais à les diffuser dans le cadre de ma série sur la biodiversité, pour participer, humblement, à ce que ces appels à l'aide ne reste pas dans l'ombre. Car lutter pour la préservation de la biodiversité, c'est aussi se battre pour que tous les peuples, ici comme ailleurs, puissent également vivre en harmonie sur notre bonne vieille planète. Et cela ne sera pas possible tant que notre société se complaira dans l'ignorance, fusse-t-elle volontaire ou non.
A l'heure où le monde entier pleure une star du pop internationale, il est triste que le sort bien sombre de ses gens, de ses enfants, de ses cultures menacées d'extinction, n'émeuve pas d'avantage nos consciences. Cela nous permettrait pourtant d'agir, en faisant pression sur les puissances industrielles qui, dans le domaine de l'alimentaire notamment (Nestlé, Monsanto, etc.), ne pensent qu'au profit, s'accaparent les ressources d'eau potable au détriment des populations locales et nous font avaler des substances de mauvaise qualité (huile de palme) tout en menaçant l'existence de nombreux écosystèmes, que ce soit dans le monde végétal et animal (OGM) ou encore humain. Poursuivons l'information critique, et relayons les cris de désespoir de ces gens, membres de populations traditionnelles dont, plutôt que d'ignorer leur existence, nous devrions plus souvent écouter et s'inspirer.
Bien à vous.
Sandro
Série "biodiversité", chapitre précédent : Biodiversité 1 - La vie endémique des Canaries
Depuis plus d'une trentaine d'années, le monde de la science, emmené par les écologues, a intégré la notion que l'espèce humaine - et ainsi l'ensemble des différentes cultures, ethnies et populations qui la compose - fait partie intégrante de la biodiversité de notre planète. Homo sapiens, s'il peut parfois (souvent) être destructeur, vis-à-vis de ses semblables comme vis-à-vis des autres formes de vie peuplant la Terre, n'en demeure pas moins, strictement, une espèce de grands singes sans poil. Ainsi, la distinction, faite par une frange (trop) influente du monde politique, entre les questions "environnementales" et "sociales" n'est dès lors plus qu'un concept stérile et désuet. La variété des cultures et des modes de vie est l'une des manifestations de ce que l'on appelle la biodiversité, manifestations étudiées, entre autres, au sein de la discipline qu'est l'écologie humaine.
Et cette notion amène une quantité incroyable de surprises. En effet, les recherches ethnologiques ont montré qu'à l'époque de la conquête spatiale et d'Internet, des gens, en aucun point différents de nous, vivent encore avec des moyens et des techniques du fond des âges. Et jusqu'à récemment, ils vivaient heureux, libres, souvent en symbiose avec la Nature. Car ces gens, peuples premiers trop vite taxés de primitifs par des colons aux mœurs souvent bien plus barbares et rétrogrades, sont, à bien des égares, en avance sur nous, car ils connaissent depuis très longtemps la nécessité de préserver leur environnement, et ignorent notamment la notion de gaspillage. Des populations à la richesse culturelle inversement proportionnelle à la quantité de leurs possessions matérielles...
Et pourtant, de part l'ignorance de nos civilisations envahissantes, ces cultures, rescapées de milliers d'années de lutte pour la survie, sont en passe de disparaître, soit par la dissolution de leur identité, soit par la mort, ni plus ni moins, des populations, que ce soit du fait de pollutions, de conflits ou encore de famines. Certes, dans certaines régions, des études comme celle de l'Université Libre de Bruxelles, semblent montrer qu'il n'est pas encore trop tard pour inverser cette tendance. Mais pour cela, il faut de toute façon que le monde prenne conscience que le mode de vie "à l'occidental" représente également une menace pour la biodiversité humaine.
Réchauffement climatique
Le réchauffement climatique est la chose à laquelle on pense en premier. Les manuels de géographie nous ont parlé du phénomène de désertification frappant le Sahel - le lac Tchad en est une illustration saisissante - et contribuant à alimenter le flot sans cesse grandissant de réfugiers. Certaines populations du Pacifique voient leurs terres se saliniser, voire être submergées par les eaux. Le cas des Maldives, en quête de nouvelles surfaces colonisables, est bien connu. Mais qu'en est-il des peuplades peu connues du grand public? La lointaine Nouvelle Guinée nous rappelle que le problème climatique frappant la biodiversité humaine est encore plus vaste que ce que les médias, traditionnellement, relatent. Cela fait des décennies que les ONG tentent d'informer (souvent dans le vide) l'opinion publique sur le drame qui se déroule silencieusement dans l'Irian Jaya, région aux centaines de langues (271 langues en Nouvelle Guinée Occidentale). En 1997, le CICR parlait des conséquences que les fortes sécheresses ont eu sur les populations locales. L'impact du réchauffement climatique n'est pas une "musique d'avenir", mais bien une réalité que les populations les plus vulnérables connaissent déjà depuis de nombreuses années. Mais le climat n'est, et de loin, pas la seule menace qui pèse sur elles.
Les conséquences de la mondialisation
La mondialisation, au sens large, est un phénomène historique de "normalisation" dont l'origine remonte, selon certains, aux vagues de colonialisme qui se succédèrent depuis la "découverte" des Amériques par Christophe Colomb. Certes, tout n'est peut-être pas noir dans la mondialisation de nos jours. Mais, sans entrer dans les détails, certaines conséquences sont très perverses et contribuent, bon-gré-mal-gré, à un appauvrissement de la biodiversité humaine. L'une des conséquences de cette "imposition d'un mode de vie occidental" que représente la mondialisation est la sédentarisation. De nombreuses populations nomades ont perdu leur identité culturelle en se sédentarisant ; ainsi, des modes de vie séculaires parfois très respectueux de l'environnement (en ne restant pas de manière fixe en un seul lieu, ces modes de vie nomade permettaient aux champs et aux pâturages de se régénérer), ont disparu ou sont menacés de l'être, favorisant par là, dans certaines régions, l'appauvrissement des ressources locales (désertification). Et que dire du simple "choc des cultures"... Les Touaregs, ces fabuleux voyageurs du désert, sont ainsi purement et simplement menacés de disparition, car leur culture est indissociable du nomadisme.
Le "néo-colonialisme criminel" à l'origine de la déforestation des forêts primaires
Une autre menace, très sournoise elle aussi, n'est rien moins que notre consommation au sens large. Par exemple, les forêts représentent un refuge considérable en forme de vie, notamment humaines. Mais en même temps, elles suscitent la convoitise de nombreuses "entités", gouvernements ou multinationales. Certains assimilent cette convoitise à un "néo-colonialisme criminel", tant celle-ci a des conséquences dramatiques. Nous y reviendrons.
Les bois précieux, que l'on trouve dans les régions tropicales, comme le tek, sont très prisés chez nous, mais leur surexploitation, et les problèmes colatéraux liés à la déforestation, enlèvent du même coup des ressources vitales pour les populations locales (matériaux de construction, nourriture, médicaments, etc.). A ce besoin très "tendance" de bois précieux s'ajoute également celui, bien plus grand, du papier. Mais la déforestation a aussi d'autres origines, comme l'exploitation minière, les agro-carburants et l'agro-industrie en général, notamment la demande très importante en produits d'alimentation pour la production de viande dans les pays riches. Et ces exploitations sont rarement à l'avantage des populations locales. Voici une vidéo en deux parties sur un cas au Brésil.
Du reste, dans le domaine du non respect des gens, l'industrie agro-alimentaire est passée maître. Avec l'huile de palme, non contente de nous faire manger des graisses diététiquement de mauvaise qualité, cette industrie, sous contrôle de grands groupes européens, américains ou asiatiques, est à l'origine d'un vrai désastre écologique et humain. Voici, également en vidéo, sur deux partie, un témoignage poignant sur ce drame humain dont notre société de consommation basée sur la minimisation des coûts est la principale responsable. Ce témoignage nous vient d'une tribu de l'île de Sumatra.
De là vient le terme de "néo-colonialisme criminel"...
Un cri de désespoir qu'il nous faut écouter
Ce désespoir, exprimé par ces peuples souvent oubliés, doit enfin être entendu. Par ce billet, je tenais à les diffuser dans le cadre de ma série sur la biodiversité, pour participer, humblement, à ce que ces appels à l'aide ne reste pas dans l'ombre. Car lutter pour la préservation de la biodiversité, c'est aussi se battre pour que tous les peuples, ici comme ailleurs, puissent également vivre en harmonie sur notre bonne vieille planète. Et cela ne sera pas possible tant que notre société se complaira dans l'ignorance, fusse-t-elle volontaire ou non.
A l'heure où le monde entier pleure une star du pop internationale, il est triste que le sort bien sombre de ses gens, de ses enfants, de ses cultures menacées d'extinction, n'émeuve pas d'avantage nos consciences. Cela nous permettrait pourtant d'agir, en faisant pression sur les puissances industrielles qui, dans le domaine de l'alimentaire notamment (Nestlé, Monsanto, etc.), ne pensent qu'au profit, s'accaparent les ressources d'eau potable au détriment des populations locales et nous font avaler des substances de mauvaise qualité (huile de palme) tout en menaçant l'existence de nombreux écosystèmes, que ce soit dans le monde végétal et animal (OGM) ou encore humain. Poursuivons l'information critique, et relayons les cris de désespoir de ces gens, membres de populations traditionnelles dont, plutôt que d'ignorer leur existence, nous devrions plus souvent écouter et s'inspirer.
Bien à vous.
Sandro
Série "biodiversité", chapitre précédent : Biodiversité 1 - La vie endémique des Canaries
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