dimanche 6 décembre 2009

Biodiversité 4 - Endémisme : le symbole Alula

Biodiversité, richesse du vivant

Aloha,

Chaque espèce vivante qui s'éteint, c'est un peu, par rapport à l'ensemble de la nature, comme une flamme dont l'éclat s'amenuise lentement. A l'instar de chaque vie humaine perdue, tout au long des innombrables conflits qui ensanglantent le monde, pertes qui entament chaque fois une part de notre humanité, toute forme de vie qui disparaît sous l'assaut de l'Homme représente un dommage inestimable pour la biodiversité, fragilisant sans cesse un peu plus l'équilibre du vivant sur notre planète.

Cette diminution de biodiversité est très flagrante dans le cas d'espèces, animales ou végétales, qu'on ne trouve qu'à un seul endroit sur Terre. C'est ce que l'on appelle l'endémisme. Lorsqu'une forme de vie est endémique à une région, une île ou un lopin de terre, cela signifie que celle-ci s'y est parfaitement adaptée (conditions de vie, nourriture, etc.). La région concernée étant parfois très réduite, le nombre d'individus est en principe relativement faible. Cette très forte adaptation au milieu, ainsi que le nombre limité d'individus, rend l'écologie de la forme de vie endémique souvent très sensible aux perturbations extérieures. Seulement, si elle vient à disparaître, ceci est définitif puisque, par définition, une espèce endémique n'existe nul part ailleurs.

Un palmier pas comme les autres

Les exemples sont, malheureusement, légions ; actuellement, le rythme d'extinction des espèces est entre 100 et 1000 fois supérieur au taux moyen estimé depuis l'apparition de la vie sur notre planète. Mais, cet état de fait reste assez abstrait auprès du grand public. Un petit tour du côté d'un archipel volcanique du Pacifique illustre cependant cette perte de biodiversité de manière... stupéfiante.

Depuis quelques temps, on peut trouver, chez les distributeurs en botanique, un curieux petit palmier, le palmier d'Hawaï, appelé aussi Alula ou encore, pour les scientifiques, Brighamia insignis. Bien qu'il ne s'agisse pas, à proprement parler, d'un palmier, son allure lui donne indubitablement un petit air de tropique.

Mon palmier hawaïen.

A priori, rien de particulier, me direz-vous. Oui, sauf que cette petite plante aux feuilles bien large est commercialisée suite à un programme de sauvegarde de l'espèce, géré par l'UICN. Car en effet, cette plante est, à l'état naturel, sur le point de disparaître (liste rouge des espèces menacées).

Sur le seuil de l'extinction

A Hawaï, vaste archipel volcanique planté au milieu du Pacifique, patrie d'origine de notre Brighamia, on ne trouvait, en 2007-2008, plus que 7 spécimens sur l'île de Kaua'i! 7 spécimens, pas un de plus! Une grosse tempête, un incendie, rien de bien méchant, et hop! Il n'y a plus de Brighamia sur la Terre. Comme quoi, pour le palmier hawaïen, la vie ne tenait qu'à un fil...

C'est pourquoi les botanistes motivés ont décidé, suite à l'urgence de la situation, d'organiser la sauvegarde de cette plante rare, en diffusant aux quatre coins du monde des graines de Brighamia.



Causes supposées

Plusieurs raisons ont été apportées quant à la situation plus que critique de cette plante de la famille des Campanulacées. Il s'agit d'un cumul de plusieurs facteurs, mais la plupart sont imputables, directement ou indirectement, aux activités humaines. Les explications avancées sont le déboisement et les brûlis, l'effet de la concurrence de plantes envahissantes non-indigènes et des activités d'animaux importés comme la chèvre. On suppose aussi que la disparition vraisemblable du seul pollinisateur de Brighamia - un papion de nuit pas clairement déterminé - aurait porté un coup fatal à l'espèce. Enfin, des facteurs météorologiques (tempêtes) s'ajoutent à ce tableau déjà fort sombre.

Avec le climat, protégeons la biodiversité

Cet exemple illustre la fragilité du monde du vivant. Le cas des espèces endémiques comme notre palmier hawaïen, à l'aire d'existence très réduite (une île) et à l'adaptation très poussée (un seul papillon pollinisateur, une niche écologique particulière) est un exemple très instructif ; on peut facilement mesurer l'impact des perturbations, naturelles ou non, subie par l'espèce, car celle-ci est de répartition très restreinte. Or, lorsqu'une espèce endémique disparaît, c'est pour de bon! Et les espèces que l'on trouve dans plusieurs lieux sur notre planète? Leur disparition localisée n'est pas non plus sans effet, car l'espèce s'inscrit toujours dans une "boucle" - le cycle alimentaire - qui forme comme une chaîne faite de maillons : si un maillon casse, c'est la chaîne entière qui s'en trouve ébranlée.

Le petit palmier hawaïen, à l'instar d'autres espèces moins connues comme le pin de Wollemi (aussi sujet à un programme de conservation similaire), sont les portes-parole silencieux de cette biodiversité si malmenée actuellement. A la veille du sommet de Copenhague, où les puissants de ce monde vont discuter du climat (espérons-le, pas pour des prunes, comme d'habitude...), il est bon de ne pas perdre de l'esprit l'urgence de la situation du point de vue de l'environnement dans sa globalité. Il ne suffit pas de poser des panneaux solaires sur un centre commercial afin de réduire la charge en CO2, si dans le même temps rien n'est fait pour limiter la déforestation (liée au commerce de la viande par exemple), la sur-pêche et le commerce non-équitable (favorisant souvent l'augmentation de la pression sur l'environnement).

Gardons à l'esprit que la biosphère n'est rien d'autres qu'une somme de tous les êtres vivants constituant cette biodiversité. Que ce soit le saumon, le pinson de Darwin, le loup, le lichen ou encore le palmier Brighamia insignis, toutes ses formes de vie ont leur rôle à jouer dans cette biodiversité... comme Homo sapiens. Faisons que le rôle de ce dernier ne se résume pas à la destruction!

A bientôt!

Sandro

Série "biodiversité", chapitre précédent : Biodiversité 3 - Nouvelles espèces découvertes, une nouvelle preuve de la complexité du vivant

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