dimanche 19 avril 2009

Biodiversité, une grande énigme, une source inépuisable d'émerveillement.

La biodiversité

Lorsque l'on explore, physiquement ou par livres interposés, notre planète et ses espaces naturelles, on est frappé et sidéré par la variété apparemment infinie des formes, la complexité des interactions biologiques et les trésors "d'inventivité" que la Nature a mis en place, à travers des millions d'années d'histoire. Ces trésors se retrouvent dans l'extraordinaire panel d'espèces vivantes et d'habitats à travers le monde. Du point de vue scientifique, cette diversité du vivant, tant dans les espèces que dans les gènes, combinée avec les diverses interactions avec le milieux (écosystèmes) forment ce que l'on appelle la biodiversité. Cette biodiversité représente la base sans laquelle la biosphère ne saurait subsister. En d'autre terme, la biodiversité représente, en quelque sorte, une "garantie de survie" pour tous les êtres vivants de la planète, Homo sapiens sapiens compris!

Les océans, poumons de la planète, où des formes de vie symbiotiques et microscopiques bâtissent des récifs


Quelques régions de notre belle planète sont de véritables "monuments" en terme de biodiversité. Citons l'une des plus célèbres, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, la Grande Barrière de corail, au large de l'Australie, seule construction biologique visible de l'espace (photo ci-dessus : image satellite d'une partie de la grande barrière de corail (NASA), http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:GreatBarrierReef-EO.JPG). Ici, un petit animal, le polype corallien, en symbiose avec une algue appelée zooxanthelle, a édifié de véritables montagnes calcaires sous-marines. Celles-ci sont de vrais refuges pour la faune marine, le grand large étant, en quelque sorte, l'équivalent des déserts terrestres : près de 1'500 espèces de poissons et de crustacés y ont en effet élu domicile. Les associations symbiotiques sont l'un des aspects "magiques" et étonnants de la biodiversité, souvent rencontrer dans la Nature (nous-même vivons en symbiose avec une foule d'organismes, comme notre flore et faune intestinale). Sans ce type de relation, celle qui relie l'algue et le polype, ce dernier ne pourrait pas former son squelette calcaire, et ainsi ne pourrait pas édifier de récif.

Les régions tropicales d'Amérique du Sud

Sur la terre ferme, l'exemple le plus frappant de biodiversité, l'un des premiers qui nous vient à l'esprit, est sans doute celui de l'Amazonie et des régions avoisinantes (les Llanos du bassin de l'Orénoque, notamment). Les forêts tropicales humides regroupent la grande majorité des espèces vivantes sur Terre. Rien qu'au niveau des arbres, si une forêt tempérée ne compte qu'une dizaine d'espèces par hectare, une forêt tropicale comme celle de l'Amazonie peuvent dénombrer plus de 300 espèces sur la même surface! Du reste, par la très forte biodiversité et l'intense productivité biologique de la canopée de ses forêts, elles constituent un précieux réservoir de molécules prometteuses pour la recherche médicale.

Un des témoins de cette prodigieuse biodiversité sud-américaine est la Mata Atlantica, la forêt atlantique des côtés sud-est brésiliennes, dénommée Réserve Mondiale de Biosphère. Elle consiste en une alternance de divers types de forêts, de la forêt humide primaire jusqu'aux mangroves. Cette forêt est, entre autre, le paradis des colibris, oiseaux miniatures habitant essentiellement l'Amérique du Sud, maîtres incontestés du vol stationnaire et merveilles "d'ingénierie" naturelle (photo ci-dessous : Colibri thalassinus, M. McNally, http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:GreenVioletear.jpg).


Le rythme de vie de ces petits êtres (Mellisuga helenae de Cuba ne pèse que 2 grammes) et leur métabolisme très rapide (de 80 à près de 200 battements d'ailes à la seconde, plus d'un millier de battements de cœur à la minute) implique qu'ils se nourrissent fréquemment et en grande quantité ; le nectar de fleur est, à ce titre, un met intéressant. L'évolution de ses oiseaux s'est ainsi faite en parallèle de celle des plantes à fleurs, celles-ci ayant développé des formes susceptibles d'attirer telle ou telle espèce d'oiseau-mouche.

De la Rift Valley au bassin de l'Okavango, les richesses vivantes de l'Afrique

A lui seul, le continent africain représente, dans la conscience collective, le temple de la vie sauvage par excellence. Berceau de l'humanité, c'est aussi la région du monde où subsistent encore quelques-uns des plus célèbres ambassadeurs de la biodiversité menacée, comme l'éléphant, le rhinocéros noir, le guépard, le lion ou le gorille des montagnes.

On y trouve aussi de merveilleux exemples d'évolutions écologiques, liés à certains bouleversements géologiques. Le plus connu est l'île de Madagascar. La faune et la flore de l'île, originaire d'Afrique, se sont peu à peu diversifiées depuis la séparation de "l'île rouge" du continent africain, il y a plusieurs centaines de millions d'années. Les résultats de cette isolation sont des plus spectaculaires, et se traduisent par une caractéristique importante dans la compréhension de la biodiversité : l'endémisme. Par exemple, c'est l'endroit où l'on peut encore trouver les derniers représentants de primates "primitifs" que sont les lémuriens ; ceux-ci, sous l'effet de la compétition avec les singes, ont complètement disparu ailleurs, notamment en Afrique. Près d'un tiers des 300 espèces d'oiseaux que compte Madagascar ne se trouve que là-bas. Et que dire du caméléon, grand mangeur d'insectes (et alliés voraces et efficaces pour les agriculteurs), dont près de 75% des espèces mondiales ne se trouvent qu'à Madagascar! Enfin, 80% des 12'000 espèces de plantes malgaches sont endémiques, sans oublier que l'île recelle plus de 900 espèces de plantes médicinales. Ci-dessous : Lemur catta - parc de l'Isalo, Madagascar - Bernard Gagnon (http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Lemur_Catta02.jpg).



Comme autre fleuron de la biodiversité mondiale en Afrique, citons encore le delta intérieur de l'Okavango, cette gigantesque zone marécageuse, relativement peu connue du grand public, où, après une longue course, faite d'une succession de méandres caractéristiques des cours d'eau à faible pendage, l'eau se perd dans une oasis de vie végétale et animale de toute beauté : tous les représentants de la faune africaine - des lions jusqu'aux hippopotames, en passant par les éléphants et les hyènes - peuvent y être observés.

Asie, Océanie : biodiversité de l'étrange

Comment ne pas parler, dans ce très bref tour d'horizon de la biodiversité mondiale, des trésors cachés en Asie et en Océanie. L'Asie, tout d'abord ; savez-vous que les derniers lions asiatiques vivent en Inde, patrie des tigres et d'une foule d'autres animaux, dont la diversité n'a rien à envier à celle des savanes africaines, plus connue? Comment ne pas parler aussi du seul grand singe d'Asie, l'orang-outan (qui signifie "homme de la forêt" en indonésien, sauf erreur...), proche parent évolutif de l'être humain, dont l'habitat se réduit comme une peau de chagrin. Et comment ne pas mentionner les bizarreries de l'évolution, comme les trésors de mimétismes de la faune entomologique indonésienne. Enfin, comment ignorer ces mystérieuses contrées préservées, sur terre ou dans les mers (comme ce lac d'eau de mer, isolé de l'océan, où nagent des myriades de méduses), dont les îles de Palau, considérées comme un "point chaud de biodiversité", regorgent (photo : http://www.notre-planete.info/photos/photo.php?id=424&pos=224&rep=cartes&rub=phenomene) :


Enfin, comment ne pas conclure sans citer l'existence de ces espèces de mammifères archaïques vivant en Océanie, dont les faunes australiennes, de Nouvelle-Guinée et de Nouvelle-Zélande en sont les typiques représentants : mammifères marsupiaux (mammifères "à poche"), ordre des monotrèmes (échidné, ornithorynque) (mammifères qui pondent des œufs). A cet égard, la biodiversité australienne n'est pas avare en reliques du passé du vivant ; outre ses gisements de fossiles très anciens, la terre des Kangourous peut s'enorgueillir de posséder l'unique lieu au monde (avec une région isolée du Mexique) où vivent des stromatolites, colonies d'algues bleues marines formant de petites structures minérales en forme de champignons, héritières d'une lignée vieille de 3 milliards d'années (pour comparaison, l'espèce humaine, d'une manière générale, est vieille de "seulement" quelques millions d'années).

Genève et ses cours d'eau : un relais indispensable et une richesse naturelle insoupçonnée

Et chez nous?

Genève, par le réseau hydrographique qui l'occupe (le Rhône, l'Arve, le lac Léman, etc.) a une importance, du point de vue écologique, plus grande que l'on pourrait s'imaginer de la part d'une telle zone urbanisée. La rade de Genève, ainsi que les berges du Rhône sont ainsi classées par la convention internationale de Ramsar sur les milieux humides ; ces sites sont d'importance nationale et internationale, car ils constituent un important point de ralliement de nombreuses espèces d'oiseaux d'eau. La castor habite dans notre canton (par exemple au Moulin de Vert à Cartigny), tout comme le chevreuil (Teppes de Verbois) et le cerf (région de Versoix). A Meyrin, la réserve des Marais de Mategnin (Marais des Crets et Marais des Fontaines), malgré sa "relative" petite taille, est une "oasis" de biodiversité en milieu urbain. Pro-Natura Genève, l'association gérant le site, a recensé 136 espèces végétales (dont 13 inscrites sur la liste rouge des espèces menacées), 80 espèces d'araignées, 13 espèces d'orthoptères (dont le Conocéphale des roseaux - Conocephalus dorsalis - encore jamais observé à Genève), 20 espèces de libellules, mais aussi 7 espèces d'amphibiens. Quant aux espèces d'oiseaux nicheurs, les Marais de Mategnin en abritent près de 66 (selon Atlas des oiseaux nicheurs du Canton de Genève ; Bernard Lugrin, Alain Barbalat, Patrick Albrecht, Editions Nicolas Junod 2003).

La biodiversité, une réalité à transmettre et à expliquer

Il serait difficile, même de nos jours, de dresser un inventaire exhaustif de l'ensemble de la biodiversité mondiale. Mais une chose est certaine : elle régresse. Et si les changements climatiques, naturels ou non, portent une part de la responsabilité dans cette diminution, l'espèce humaine, par inconscience ou par ignorance, en est véritablement le grand maître d'œuvre. Que ce soit au niveau des espèces endémiques (très précieuses, très rares par définition mais plus sensibles que d'autres, de part leur extrême adaptation au milieu) ou à celui des espèces "clé de voûte" (espèces indispensables, de part leur impact, au bon fonctionnement d'un écosystème : le loup, la loutre de mer ou encore le figuier des zones tropicales), des pans entiers de Nature sont menacés d'éradication définitive ou ont déjà disparu! Plusieurs exemples, là aussi non exhaustifs : depuis le début de l'ère coloniale, la Mata Atlantica a perdu presque la totalité de sa surface originelle, pour n'atteindre que 8% de son état initial ; par la réduction de leur espace vital et leur maintien dans des zones confinées trop petites, la situation des grands félins d'Afrique est préoccupante, la population de guépards étant par exemple passée de 100'000 espèces à travers le monde au début du 20ème siècle à quelques milliers cent ans plus tard (dont 300 rien qu'au Serengeti, en Tanzanie) ; le braconnage intensif a entraîné la quasi éradication du rhinocéros noir, dont la population a été divisée par 10'000 (!) en près d'un siècle! Selon l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), près de 18'000 espèces vivantes sont menacées, mais 5'000 espèces animales et 34'000 espèces végétales sont, à plus ou moins long terme, menacées d'extinction. La problématique s'intensifie encore d'avantage, lorsque l'on sait que, jusqu'ici, les recherches de l'UICN n'ont porté que sur un total d'environ 41'000 espèces (2008), soit environ 0.2 % du vivant. Cela a de quoi laisser songeur!

Par leur livre au titre évocateur - La Sixième Extinction, Éditions Champs-Flammarion - Richard Leakey, célèbre paléoanthropologue kenyan, et Roger Lewin, biologiste et spécialiste de l'écologie de l'évolution, essaient, parmi tant d'autres, de susciter une prise de conscience par rapport à notre responsabilité vis-à-vis de cette catastrophe écologique. D'autres, des scientifiques travaillant sur le terrain et, bien souvent, dans l'anonymat et avec un manque de moyen scandaleux (propre à la recherche scientifique "sans but lucratif direct", malheureusement), tentent de comprendre, jour après jour, l'ensemble des mécanismes naturels que constitue la biodiversité, afin notamment de saisir les véritables enjeux pour l'humanité nécessitant sa sauvegarde.

En conclusion, une constante subsiste concernant les multiples problèmes liés à la protection de la biodiversité : le manque de connaissances. Il est, dès lors et plus que jamais, nécessaire de transmettre à tous la moindre information au sujet des richesses naturelles, ici comme ailleurs. Histoire de dissiper, autant que possible, l'aura de flou qui entoure le terme de biodiversité. A mon très humble niveau, je profiterai ainsi de ce blog pour vous communiquer le plus possible de données, sur l'état de la Nature, que ce soit à l'autre bout du monde comme chez moi, à Genève, région plus riche et plus précieuse que ses habitants ne le pensent. Par l'information et, je l'espère aussi, par l'émerveillement que la Nature peut susciter en nous, il est peut-être encore temps de faire quelque chose. Car, tout comme il est plus facile de laisser dépérir des populations lointaines que l'on ne connaît pas, si nous comprenons enfin ce que signifie une "nature préservée", il sera probablement beaucoup plus compliqué de continuer ou de laisser faire, dans la plus pure impunité, les rythmes de destructions écologiques actuels qui ravage l'aboutissement de plus de 3,5 milliards d'années d'évolution!

La biodiversité, si elle reste encore une énigme, n'en apparaît pas moins comme une pièce maîtresse au bon fonctionnement du monde, un merveilleux ensemble d'écosystèmes, de créatures, de couleurs variées et de relations biologiques! Une incroyable source de joie et de sérénité pour qui sait au moins en apprécier toute la complexité, tout le spectacle! Et une part de notre planète qui la rend tout simplement vivable pour nous!

Sandro

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire